La guérison par le vide (instantanés)
Le mental offre de belles dérives à celui qui se laisse emporter par la tempête et le flux (des pensées) : c’est quand tu viens gratter à mes rêves que je me souviens de ton visage. Le flou de l’enveloppe énergétique suffit amplement pour afficher une forme plus ou moins fidèle. J’ai gardé des photographies troubles (des instantanés aux bords grignotés par l’humidité et la poussière du temps). Le grain brut monochrome magnifie des morceaux de corps sur des tables pleines de vignes sèches. Quelques singes se disputent les grains survivants. Peu à peu, se dessinent les rencontres du passé, avec son lot d’absence. Et du vide jaillit le pansement de l’âme. La mémoire comme un trou — la profondeur d’un puits d’eau stagnante. Sur les perles de pluie, les gerridés dansent en cercle jusqu’à la transe. Un feu incandescent – la cheminée de béton s’embrase. Du fond de l’âtre, les étoiles remontent à la surface et s’échappent vers le ciel. Le guru indien avait raison de mettre un bonnet (l’énergie cosmique s’évapore par la tête). Traverser l’Inde et la lumière brune des buissons (là où poussent les plantes de l’esprit). Le thé et le lait de brebis. Les premières visions de l’aube. Un grand singe entrouvre la porte de la terrasse pour un éveil douloureux. Shiva me fait de l’œil sur un parking. Les divinités font leurs courses dans un supermarché. Le cerveau lavé aux sources du Gange, pour finir sur le bûcher des Ghats sacrés. Un premier jet met fin aux tensions écrire-plaisir. La feuille raturée par les fluides nocturnes. Je n’ai rien d’autre à offrir que l’haleine de ma bouche qui conserve le goût des plaines d’Himalaya.
— 16 novembre 2025